J'avais envie de faire un peu d'Histoire en me basant sur un ouvrage (une fiche de lecture quoi !) et j'ai eu l'idée de fouiller dans mes anciens dossiers de Master (oui c'est du réchauffé !) et voilà donc après quelques remaniements une petite Histoire des tissus en France.
Ce texte se base essentiellement sur l'ouvrage d'Alexandra Frau, Histoire des tissus en France, Tours, 2010. (Excusez, pas de traduction en Anglais ...).
De plus, je pense que ce petit texte peut être assez utile dès lors que l'on veut se lancer dans le costume, les Historiens ne sont pas tous ennuyeux et pédants ! (Et Lorànt Deutsch n'est pas Historien ce qui ne l'empêche pas d'appartenir à la seconde catégorie :p)
Introduction
Au siècle des lumières, le tissu est une source inépuisable de
mode. Les première soies peintes recouvrent les murs des belles
demeures avant d’aller garnir les armoires des élégantes. Il en
est de même pour les indiennes dont tous les mondains vont se parer.
Madame de Pompadour, sensible au style de ces cotonnades, en tapisse
les murs de plusieurs de ses demeures.
Le fil
De la qualité du fil dépend la noblesse d’une étoffe. Qu’il
soit de laine, de coton, de chanvre ou de soie il se décline en plusieurs qualités. Les étoffes pures fil, tissées à partir des
fibres les plus longues offraient une résistance et une tenue plus
grande.
La laine
Employée depuis toujours la laine empli les armoires des
foyers des plus riches aux plus modestes. A la campagne les familles
se contentaient du produit de la tonte de leur cheptel pour tricoter
des bas de laine, ou encore tisser d’épaisses couvertures ou des
tuniques de grosse futaine.
Dans les milieux plus riches la laine connait un grand succès depuis
le moyen-âge. Elle fait la fortune des drapiers, placés en haut de
la hiérarchie de ce vaste commerce. Cet engouement provoqua la mise
en place de manufactures royales, et chaque région fabriquait des
draps de qualités différentes. Bayonne fut rendue célèbre pour
ses poils qui servaient de lisière aux draps. La région se fit
connaître également pour ses draps noirs, à base d’un mélange
de poils d’autruche et de chameau.
Les produits luxueux favorisaient les fibres les plus longues,
favorable à un filage et à un tissage plus sec rendant les étoffes
plus belles et plus résistantes. Le mohair faisait partie de ces
belles laines, ce poil de chèvre angora offrait un lainage léger et
soyeux au toucher
De la filature dépendait la qualité et la solidité du fils
obtenu. Seule une laine filée très fins et très régulièrement
pouvait donner un tissu plus léger et plus résistant. La fibre de
laine de cessa de séduire, que ce soit au moyen-âge, ou au XVIIIe
siècle avec les droguets. Parallèlement un gout pour les lainages
plus légers ouvrait la porte aux étamines (étoffes mince non
croisée et peu serrée pour les chemises) aux serges, aux
tiretaines, aux droguets également.
Le lin
Le lin est associé dès le début à l’idée de légèreté et de
pureté et donne son nom au « linge » (venu de linga,
d’où est extraite la fibre). A la fois solide, brillante, fraiche
et légère, cette fibre donne des tissus qui se froissent avec
élégance. Malgré toutes ces qualités, les paysans sont fort peu
enclins à la cultivé. Sa récolte et sa préparation son jugées
fort ingrate et de ce fait dissuadait ceux qui voulait bien la
cultiver.
La fibre de lin était issue du pourtour de la tige, et non de
l’intérieur, de ce fait elles étaient arrachées à la main, puis
séchées au soleil. Après la moisson du blé, les tiges sont
plongées dans l’eau tiède, et maintenue au fond par un poids. On
les fait de nouveau sécher au soleil, la tête en bas, puis une fois
sèche, on les broie, alors on peigne pour séparer la fillasse.
Du gros lin rêche au toucher aux fines batistes diaphanes, en
passant par les lourds sergé, il en existait plusieurs qualités. Le
lin se tissait plus ou moins finement. Du coutil au cainsil,
l’éventail était large et les usages variés. Le coutil, grosse
toile à trame serrée, convenait par sa lourdeur et sa robustesse
aux vêtements du dessus qui s’usaient beaucoup plus vite. Pour les
chemises de travail en coutil, le lin était lainé sur l’envers
pour ne pas meurtrir la peau. C’était un textile bon marché, dans
lequel les femmes taillaient volontiers des doublures, des corsets,
et des tabliers.
Le cainsil était quant à lui réservé à la fabrication de
chemises élégantes, et des voiles dont se couvraient les femmes. La
légèreté et la transparence du couvre-chef, un tissu très léger
en lin, seyaient parfaitement aux voiles. A leur tour bonnets,
velettes, engageante, mantilles, bagnolettes, petites capelines,
barbe set battant l’œil que les dames nouaient autour du menton,
faisaient la part belle au lin.
Le chanvre
Le chanvre, cette grosse filasse bien robuste servait à fabriquer
les vêtements de tous les jours, et le linge de maison. Les paysans,
en cultivaient quelques hectares pour leur consommation personnelle,
ils le filaient et le tissaient eux mêmes. La France devint ainsi le
plus grand cultivateur de chanvre. Le chanvre le plus fin dit « de
plein » était utilisé pour les chemises. Si le chanvre
produisait des vêtements à moindre frais il était difficile à
travailler. La technique à laquelle il fallait recourir pour la
culture et les apprêts s’apparente à celle utilisée pour le lin.
Mais le résultat obtenu n’était pas aussi flatteur que celui dû
au travail du lin. Le chanvre gardait une couleur rouille secrétée
par la fibre et une grande rugosité. Malgré tout les femmes y
taillaient leurs chemises de nuit, quelques draps, le corps des
chemises, dont les extrémités pouvaient être réalisées en lin ou
en coton. Avec le rebut de filasse (l’étoupe), dont les brins
étaient trop courts pour être tissés, elles confectionnaient des
paillasses ou de grossiers tabliers.
Le coton
C’est au XIVe siècle que l’idée de tisser le coton est venue,
auparavant on ne savait que faire de cette bourre étrange. Les
tisserands commencèrent à tisser les premiers métis. La fameuse
futaine, à chaîne de lin ou de laine et à trame de coton, dont
étaient faits les cotillons, remonte à cette époque. Le coton
n’était employé que dans les basins, et les futaines, produit en
petite quantité. Le basin, mélange de lin, ou de chanvre et de
coton, se déclinait sous plusieurs formes. Les moins bonnes qualités
étaient utilisées pour les rideaux ou meubles de bains. A la fin du
XVIIIe siècle, les tisserands sont parvenus à métamorphoser ce
métis en une étoffe très fine, d’une grande blancheur très
recherché par les mondains.
Hormis cette forme de métis, l’usage du coton ne France est encore
assez limité. Il arrivait par balles entières, dans les ports de
Marseille, Nantes, ou La Rochelle sans qu’il ne suscite trop de
convoitises. Les blancardes, bouracands, et berluches à chaînes de
fils et trame de laine, dont Rouen s’était fait une spécialité,
étaient de piètre qualité. Il fallut attendre l’arrivée des
indiennes pour que les qualités du coton soient enfin révélées.
Ces étoffes habillèrent d’abord les intérieurs, lit ou bassin,
et ensuite elles remplirent les armoires (robe de chambre, mouchoirs
de cou). Aux côtés des indiennes, étaient débarqués, des
marchandises dites « blanches » par al compagnie
française. Une vaste quantité de calicots, de toile, de « garas »,
de taffetas, d’organdis, de « guinées blanches »,
déstinées à être employés tels quels étaient importés. Ces
fines mousselines et cotonnades se prêtaient facilement aux
broderies, et repassages empesé.
La folie des couleurs
Au début la palette des couleurs était relativement réduite. Le
bleu, le rouge, le jaune, le noir, faisait partie des couleurs dites
simples à partir desquelles les teinturiers pouvaient obtenir toutes
les teintes possibles en les mélangeant les unes aux autres, ou en
ajoutant divers produits. Durant la coloration du tissu, il arrivait
que les teintes soient modifiées. Certains mordants comme l’étain
mélangé au Kermès, un insecte parasite du chêne Kermès, qui
donnaient la fameuse couleur écarlate des Gobelins.
Les lissiers du M-A disposaient d’une vingtaine de tons, au XVIIIe
siècle, ils n’en ont pas moins de 14 000 à leur disposition.
Cette profusion commence à l’époque où le nouveau monde est
découvert. Le rocou apporte une note acidulé à la palette des
jaunes orangés, la cochenille venu du Mexique complète la palette
de rouge. Sa rareté en fait une couleur d’exception, et tous les
jeunes hommes se font peindre vêtus d’écarlate. Le cramoisi est
une autre couleur qui revient fréquemment dans les descriptions de
tissus, ce terme sous entendait moins un couleur éclatante, qu’une
couleur d’excellente qualité. De même l’évocation du pourpre
laisse imaginer des nuances allant du rouge profond, au bleu,
jusqu’au violet. Cette couleur cardinalice provenait du liquide
colorant issu de coquillage. Le rouge pouvait également être obtenu
à partir de végétaux. Par exemple la carthame donnait un rose
clair, mélangé à l’alun et au tartre, on obtenait un rouge
orangé. Dans des tonalités plus soutenues, il convient d’évoquer
le rouge garance, extrait de la plante du même nom. C’est avec la
garance que l’on fabriquait le rouge andrinople, dit aussi « rouge
turc » importé près de Rouen à Darnétal.
Les jaunes provenaient de plantes comme le curcuma, la gaude, le
genêt, la sarette, le safran, ou le fustet dont on tirait le fameux
jaune provençal. La gaude était appréciée par les teinturiers sur
soie, sur coton ou sur laine, pour ses couleurs solides. Ses
tonalités oscillaient du jaune éclatant au vert pâle lorsqu’elle
était mélangée à du cuivre.
La mode des couleurs au M-A est remplacée par la mode du noir,
lorsque les teinturiers réussissent à fixer cette couleur, la cour
de bourgogne s’entiche de cette couleur, dont elle transmit le gout
à la cour d’Espagne, cette couleur faisait très bien ressortir
les bijoux, et les brelots dont les grands se paraient. Le noir
devint ensuite la couleur de prédilection du luxe et de la
discrétion, faisant la part belle aux draps de Flandres parmi les
plus fins, et les plus couteux à l’époque. Le noir était une
couleur difficile à obtenir virant bien trop souvent au gris. Les
plantes d’où étaient tirées produits tannant étaient les chênes
(noix de galles), le noyer (brou de noix), du châtaigner (écorce)
ou du sumac. Les noix de galles mélangées au sel de cuivre et de
fer avaient tendance à assombrir davantage les teintes.
Le blanc éclatant de maintenant n’existait pas, les couleurs les
plus approchantes étaient obtenus au prix de longues heures de
travail pour les blanchisseuses. L’importation des indiennes de
fit que renforcer ce gout pour le blanc.
Le bleu était la couleur par excellence, il entrait dans la
composition d’autre couleur, et permettait d’obtenir plusieurs
valeurs d’une même teinte. Les bleus venaient de diverses
plantes : le pastel, l’indigo, et la guède. Dans l’antiquité,
l’indigo naturel était tirer des feuilles de pastel, pourtant il
ne tient pas à la teinture. Au XIIe siècle le bleu si
caractéristique est extrait des feuilles de l’indigotier. Au
XVIIIe siècle cette couleur est réservée à la famille royale.
Le marron fut une couleur communément adoptée par les paysans.
Comme pour le noir les teinturier utilisent des plantes à tanin. Ils
obtenaient du brun à partir du sumac ou du cachou.
Les fripes
Pour qui n’avaient pas les moyens de s’offrir la dernière mode
en matière de vêtements, il existait les friperies. Les populations
se contentaient souvent de vêtements de seconde main. Il était
permit aux fripiers d’enjoliver, et de retraiter les vêtements
qu’ils revendaient.
Les tissus faisaient partis de la vie courante, et de réemployaient
et se transmettaient jusqu’à ce qu’il ne reste plus que des
lambeaux. Les femmes s’évertuaient à repriser les vêtements, et
on remarque que le patchwork n’est pas seulement anglais. Nombre de
caracos de la fin du XVIIIe siècle témoignent de cette économie
domestique. Avec des tissus mis bouts à bouts on fabriquait de
nouveaux vêtements. Ceci explique la présence, dans certain inventaire après décès, de tissu dits "mi usés" ou "mi neufs, mi usés".
Les tissus du labeur
Le costume masculin de tous les jours se caractérisait par une
grande sobriété. Ils e composait souvent d’un gilet porté sur
une chemise de toile ample en lin ou en chanvre dont le pan le plus
long pouvait servir de caleçon et éviter le contact rude du
pantalon. Le pantalon était de teinte noire ou brune, en futaine ou
en coutil. La garde robe des paysannes était aussi simple et
comportait peu de pièces ; un casquin d’indienne, trois
jupons, dont un en serge, un en indienne, et un dernier en siamoise
rayée bleue et blanche, un tablier de toile, deux paires de bas de
coton et de laine pour l’essentiel. Mais le costume paysan n’était
pas fait uniquement de grosse étoffes, rêche de couleur sombre, il
laissait parfois place à quelques frivolité, comme la couleur, ou
les motifs, ou simplement des tissus plus léger.
Les dessous
Les femmes portaient pour tout linge de corps une longue chemise de
grosse toile sur laquelle elles laçaient leurs corps à baleines,
cet ancêtre de corset. L’étoffe de la chemise était censée
protéger la peau des meurtrissures que pouvait infliger le corps à
la peau.
La corbeille de mariage
La traditionnelle corbeille de mariage était censée couvrir les
besoins du jeune couple. Elle contenait toutes sortes de bijoux, de
dentelles, de châles ou de rubans offerts par l’époux à sa
promise. S’y ajoute les présents des familles, les amies
confectionnaient une couverture de patchwork, qu’elles avaient
cousu ensemble à la veillée, les mères y ajoutaient le linge
qu’elles avaient reçu pour leur propre mariage. Ce pouvait être
une robe de baptême, ou de beaux habits qui avaient survécus à
l’épreuve du temps, une robe de mariage. Seule exception, en Bretagne, les femmes se
faisaient enterrées avec leur robe de mariée.
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